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Le Premier ministre François Bayrou a officialisé, le 15 janvier 2025, l'abandon du projet controversé visant à augmenter de 1 à 3 le nombre de jours de carence en cas d'arrêt maladie pour les agents publics. Cette mesure avait initialement été envisagée pour réduire l'absentéisme, perçu comme un coût important pour les finances publiques. Cette décision met un terme à des mois de tensions sociales, marqués notamment par la mobilisation du 5 décembre 2023, durant laquelle l'ensemble des organisations syndicales de la fonction publique avait fermement rejeté cette mesure. Toutefois, si le maintien du jour unique de carence est une victoire pour les syndicats, une autre mesure vient assombrir ce tableau : la réduction de l'indemnisation des arrêts maladie de 100 % à 90 % du traitement des agents publics a récemment été approuvée par le Sénat.
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Un compromis économique aux lourdes conséquences
La décision de maintenir un seul jour de carence est présentée comme une compensation par le gouvernement. Laurent Marcangeli, ministre de la Fonction publique, a déclaré que « cette mesure difficile mais indispensable au regard de la situation de nos finances publiques » permettra de générer des économies substantielles. Les chiffres avancés par les inspections économiques montrent que la baisse de l'indemnisation des arrêts maladie à 90 % devrait permettre une économie de 900 millions d'euros, surpassant largement les 289 millions attendus de l'augmentation à trois jours de carence.
Bien que cet amendement soit présenté comme une alternative à la hausse des jours de carence, son adoption par le Sénat suscite de vives inquiétudes. Par exemple, des syndicats comme la FSU et la CGT ont alerté sur le risque de précarisation accrue des agents, tandis que certains représentants locaux ont souligné que cette mesure pourrait aggraver l'épuisement professionnel. Ces voix s'ajoutent aux témoignages d'agents confrontés à des choix financiers difficiles en cas de maladie prolongée. Les agents publics, déjà confrontés à des conditions de travail exigeantes, devront dorénavant assumer une perte de revenu significative lors de leurs périodes d'arrêts maladie. Cette mesure touchera de plein fouet les catégories les plus vulnérables, notamment les agents de catégorie C, dont les traitements modestes rendent toute déduction financière particulièrement lourde.
Une stratégie budgétaire critiquée
Pour le gouvernement, cette décision s'inscrit dans une stratégie globale de réduction des dépenses publiques, jugée nécessaire face à une dette publique en constante augmentation, qui dépasse actuellement 3 000 milliards d'euros, soit environ 115 % du PIB. Ces chiffres illustrent l'urgence pour l'État de freiner la progression de la dette afin de préserver la soutenabilité des finances publiques. Toutefois, les organisations syndicales dénoncent un « double discours » : si le maintien d'un seul jour de carence peut être vu comme une concession, la baisse des indemnités représente un échec majeur pour les discussions menées depuis plusieurs mois. « Il s'agit d'une mesure pénalisant les agents malades, sans réellement traiter les causes structurelles de l'absentéisme dans la fonction publique », déclare Maryse Laurent, secrétaire générale de la FSU.
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D'autres critiquent également l'impact psychologique et professionnel de cette mesure. La perte de 10 % du traitement en cas d'arrêt maladie pourrait dissuader certains agents de se mettre en congé maladie, même lorsqu'ils en ont besoin, favorisant ainsi des situations de travail précarisées et un risque accru d'épuisement professionnel. Une étude menée par l'Institut national de recherche en santé publique (INSRP) en 2024 a déjà mis en lumière l'impact négatif de mesures similaires sur la santé mentale des agents, concluant à une augmentation notable du stress et de l'absentéisme prolongé.
Quelles perspectives pour la fonction publique ?
Cette mesure soulève des questions sur l'avenir du dialogue social dans la fonction publique. Si le retrait des trois jours de carence est une victoire symbolique, la baisse de l'indemnisation laisse un goût amer aux syndicats et pourrait renforcer la mobilisation des agents publics dans les mois à venir. Certaines organisations syndicales ont déjà annoncé leur intention de relancer les négociations pour obtenir un retour à une indemnisation pleine des arrêts maladie.
En outre, cette réforme pourrait avoir un impact sur l'attractivité des carrières dans la fonction publique. Alors que les administrations locales peinent déjà à recruter dans certains secteurs clés, cette mesure pourrait décourager de potentiels candidats, renforçant ainsi la crise des vocations.
Le maintien d'un seul jour de carence pour les arrêts maladie des agents publics est une décision saluée par les syndicats, mais elle ne saurait masquer l'impact négatif de la baisse de l'indemnisation des arrêts maladie. Cette mesure, bien qu'efficace sur le plan budgétaire, risque de fragiliser davantage un secteur déjà sous pression. Le gouvernement devra faire preuve de prudence pour répondre aux attentes des agents et préserver un dialogue social déjà mis à rude épreuve. Une piste pourrait être de renforcer les espaces de concertation régulière avec les organisations syndicales et d’élaborer des mesures visant à mieux soutenir les agents les plus exposés aux nouvelles contraintes budgétaires.
Selon l'association www.naudrh.com , bien que les économies réalisées puissent sembler nécessaires, elles risquent de nuire à la cohésion et à la motivation au sein de la fonction publique. Un équilibre plus fin aurait été souhaitable pour concilier rigueur budgétaire et reconnaissance des conditions de travail des agents.
Par Pascal NAUD
Président www.naudrh.com
Contact naudrhexpertise@gmail.com