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Les fonctionnaires, figures de l'administration publique, ont toujours suscité des débats dans la société française. Leur rôle est souvent perçu sous des angles contrastés : d'une part, ils sont parfois accusés de paresse et d'inutilité ; d'autre part, en période de crise, notamment sanitaire, ils sont portés aux nues pour leur investissement et leur réactivité. Laurent Marcangeli, ministre de la Fonction publique, a récemment exprimé la nécessité de "battre en brèche le procès en paresse que l'on fait aux fonctionnaires", une déclaration qui illustre une réalité complexe : la dualité de la perception de la fonction publique dans l'opinion publique.
L'une des images les plus persistantes des fonctionnaires dans l'opinion publique est celle de l'agent « paresseux », une figure qui semble peu engagée et inefficace. Cette vision simpliste s'explique en partie par des préjugés historiques, où l'image du fonctionnaire assiste à son bureau, loin des réalités du terrain, a perdu. Ce stéréotype se nourrit d'une critique régulière des dépenses publiques et de l'administration, qui serait vue comme un poids pour la société.
Des exemples de ces critiques sont abondants : les grèves de fonctionnaires, notamment dans l'éducation nationale ou les hôpitaux publics, sont souvent perçues comme des revendications excessives et une entrave au bon fonctionnement des services. Leurs conditions de travail sont parfois jugées trop favorables, générant des idées de privilèges et de lenteur bureaucratique. Cette perception, alimentée par certains discours médiatiques, crée un fossé entre la fonction publique et les citoyens.
Cependant, cette vision négative est mise à mal dès lors qu'une crise frappe. La pandémie de Covid-19 en 2020 est un exemple frappant. Durant cette période, les agents des collectivités locales ou les personnels hospitaliers, ont joué un rôle crucial pour maintenir la continuité des services publics essentiels. Les maires, les travailleurs sociaux, les éducateurs spécialisés, les agents d'entretien et tous ceux qui travaillent sur le terrain ont montré la résilience de la fonction publique.
Les agents publics ont été en première ligne pour assurer la gestion des centres de vaccination, l'aide aux personnes vulnérables, la gestion des flux de patients dans les hôpitaux et le maintien de l'ordre public. Ces fonctions ont démontré l'importance de la proximité des agents territoriaux avec les populations, en particulier en temps de crise. La solidarité locale, symbolisée par les communes, est devenue un phare dans la gestion de la pandémie.
Les collectivités territoriales ont, par exemple, développé des dispositifs d'accompagnement d'urgence pour les personnes âgées, les familles en difficulté, les étudiants précaires, etc. Ces actions ne sont pas l'apanage des grandes crises ; elles révèlent en permanence un rôle indispensable dans l'équilibre social des territoires.
Le rôle des agents de la fonction publique territoriale, au plus près du terrain, est un élément fondamental pour comprendre l'utilité sociale de la fonction publique. Ils sont souvent les visages invisibles mais indispensables des services de proximité : gestion des écoles, entretien des espaces publics, gestion des déchets, soutien social, etc.
En dehors des périodes de crise, ces agents assurent la gestion quotidienne des services essentiels à la vie des citoyens. Dans les petites communes comme dans les grandes agglomérations, les collectivités territoriales doivent répondre à des besoins diversifiés : de la sécurité publique à la gestion des transports, en passant par les services sociaux et l'éducation. En effet, l'enjeu n'est pas simplement de maintenir une administration fonctionnelle, mais de garantir une égalité d'accès aux services publics pour tous, déterminant des inégalités sociales ou géographiques.
Les agents territoriaux sont, par leur présence, un garant de cette égalité, surtout dans les zones rurales ou en périphérie urbaine, où la proximité et la réactivité de l'administration sont primordiales. Un exemple éclairant est celui des travailleurs sociaux en zone urbaine sensible, qui accompagnent des familles en difficulté, assurant l'insertion professionnelle ou soutenant les jeunes dans leur parcours scolaire. Ces actions, souvent invisibles dans le quotidien, sont pourtant essentielles à la cohésion sociale et à l'intégration de tous les citoyens dans le système républicain.
La fonction publique traverse aujourd'hui des défis importants. Si la crise sanitaire met en lumière le rôle essentiel des agents publics, la reconnaissance de leur travail au quotidien reste un enjeu majeur. Le dialogue social, souvent difficile, doit être amélioré pour permettre aux agents de la fonction publique de bénéficier d'une reconnaissance adéquate, non seulement financière mais aussi morale.
Les réformes récentes, parfois axées sur la réduction des effectifs ou la rationalisation des dépenses publiques, ont exacerbé la méfiance entre les autorités publiques et les syndicats. De ce fait, le renforcement du dialogue social dans la fonction publique, notamment territoriale, est une priorité. La réconciliation entre l'opinion publique et les fonctionnaires passe par une meilleure communication sur le rôle stratégique de ces derniers et une évolution des politiques publiques prenant en compte leurs conditions de travail.
En définitif, les fonctionnaires, et notamment ceux des collectivités territoriales, ne sont pas des éléments accessoires du fonctionnement de la société, mais des piliers essentiels. Leur rôle de proximité, leur engagement dans la gestion des crises et leur contribution au maintien de la cohésion sociale sont des éléments essentiels pour la stabilité et l'équité du pays. Toutefois, ces travailleurs restent souvent mal compris, pris entre des critiques de paresse et une reconnaissance tardive en temps de crise.
Le ministre Laurent Marcangeli, en appelant à « battre en brèche » les procès en paresse à l'égard des fonctionnaires, soulève une question cruciale : celle de la manière dont la société reconnaît la fonction publique dans ses multiples dimensions. Ce n'est qu'en rétablissant un dialogue ouvert et en reconnaissant la diversité des métiers de la fonction publique que l'on pourra réconcilier l'opinion publique avec la réalité du service public et des agents qui, au quotidien, font vivre les principes républicains.
Avis www.naudrh.com : il est primordial de réévaluer la perception des fonctionnaires. Leur rôle est souvent sous-estimé par une partie de la population, malgré leur impact direct sur la vie quotidienne des citoyens. Ils sont les gardiens de l'égalité et de la solidarité, et devraient être davantage valorisés pour cela. Le défi consiste à réconcilier cette reconnaissance avec les réformes nécessaires à une fonction publique moderne et efficace.
Par Pascal NAUD
Président www.naudrh.com
Contact naudrhexpertise@gmail.com