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La loi de finances pour 2025 marque un tournant dans la gestion des congés de maladie ordinaire (CMO) des agents publics. Depuis le 1er mars 2025, la rémunération des fonctionnaires est réduite à 90 % du traitement durant les trois premiers mois d'arrêt, avant de passer en demi-traitement pour les neuf mois suivants. Cette mesure s’applique également aux agents contractuels de droit public à compter de la même date.
Une réforme de la rémunération des CMO qui ne règle pas toutes les disparités
Si cette évolution vise une plus grande convergence entre fonctionnaires et contractuels, elle ne résout pas l’ensemble des disparités qui persistent au sein de la fonction publique. En effet, les trois versants – État, territorial et hospitalier – disposent encore de régimes différenciés en matière de rémunération en cas d'arrêt maladie. Par exemple, un agent territorial en arrêt maladie voit sa rémunération réduite plus rapidement qu’un agent hospitalier, qui bénéficie d’un maintien de traitement plus long. Cette disparité peut entraîner un sentiment d’injustice, notamment dans les services où ces différentes catégories d’agents travaillent ensemble sous des statuts distincts. Elle peut également générer des frustrations chez les agents et complexifier la gestion administrative des collectivités. Cette hétérogénéité pose un problème d’équité et de lisibilité des dispositifs indemnitaires.
Les pistes d'une harmonisation nécessaire
Plusieurs leviers pourraient être actionnés pour réduire ces inégalités et améliorer la cohérence du système :
1. Une harmonisation complète des régimes de rémunération en cas de CMO : instaurer un cadre commun garantirait une égalité de traitement entre tous les agents publics, quel que soit leur versant ou leur statut, tout en facilitant la gestion des arrêts maladie pour les employeurs publics.
2. Le maintien du plein traitement pour les agents exposés à des conditions de travail spécifiques : certaines professions sont particulièrement éprouvantes physiquement et psychologiquement. Un maintien du plein traitement pour ces agents pourrait être une reconnaissance des contraintes de leur métier et de leur engagement au service du public.
3. Une meilleure articulation entre indemnités et droits à congé maladie : actuellement, les primes et indemnités perçues par les agents sont rarement prises en compte en cas d'arrêt maladie, ce qui entraîne des baisses de revenus. Une réforme visant à mieux intégrer ces éléments dans le calcul des indemnités permettrait de limiter les pertes financières injustes.
Vers une refonte globale pour une meilleure équité
Une solution envisageable serait la mise en place d’un régime unique de rémunération en cas d’arrêt maladie, intégrant un mécanisme progressif de maintien de salaire en fonction de l’ancienneté et du type de poste occupé. Par exemple, un agent avec moins de cinq ans d'ancienneté pourrait bénéficier d'un maintien à 90 % de son traitement pendant trois mois, tandis qu'un agent ayant plus de dix ans de service pourrait conserver son plein traitement pendant une période plus longue avant de passer à une indemnisation dégressive. De même, les métiers soumis à des contraintes physiques ou psychologiques particulières, comme les soignants ou les forces de sécurité, pourraient voir leur durée de maintien de salaire ajustée en fonction de leur exposition aux risques. Cela permettrait d’adapter le dispositif aux spécificités des différentes professions tout en garantissant une lisibilité accrue des droits des agents.
Par ailleurs, une concertation approfondie avec les représentants des agents et des employeurs publics serait indispensable pour garantir une réforme équitable et pragmatique. Si la nécessité de maîtriser les dépenses publiques justifie certaines restrictions, celles-ci doivent être perçues comme justes et proportionnées pour être acceptées par les agents. Pour garantir cette perception, des critères tels que la durée de l’arrêt, l’impact sur la continuité du service public et le niveau de pénibilité du poste occupé pourraient être pris en compte. De même, une évaluation régulière des effets de ces restrictions sur les agents permettrait d’ajuster les dispositifs en fonction des réalités du terrain.
La réforme de mars 2025 constitue une avancée vers une harmonisation des règles applicables entre fonctionnaires et contractuels. Cependant, elle ne suffit pas à résoudre les disparités persistantes entre les différents versants de la fonction publique. Une refonte plus globale, prenant en compte les spécificités des métiers et la nécessité d’un cadre budgétaire soutenable, permettrait d’apporter davantage de justice et de clarté dans la gestion des arrêts maladie. Pour financer une telle réforme, plusieurs pistes pourraient être explorées, comme la mutualisation des fonds dédiés aux arrêts maladie entre les différents versants de la fonction publique, la mise en place d’un fonds spécifique alimenté par une cotisation progressive des employeurs publics, ou encore l’optimisation des dispositifs de prévention des risques professionnels afin de réduire le nombre et la durée des arrêts. Ces solutions permettraient d’assurer une transition plus équitable et d’éviter un impact financier excessif sur les budgets publics. Une approche concertée et équilibrée garantirait un dispositif adapté aux réalités du terrain, tout en assurant une meilleure équité entre l’ensemble des agents publics.
Par Pascal NAUD
Président www.naudrh.com
Contact naudrhexpertise@gmail.com