/image%2F1484234%2F20250529%2Fob_ae07bd_remboursement-transport.png)
Dans un contexte où la transition écologique devient un impératif pour l’ensemble de la société, la fonction publique territoriale, en tant qu’employeur majeur, se doit d’adopter des pratiques respectueuses de l’environnement. Parmi ces initiatives, l'une des plus efficaces pour réduire l'empreinte carbone des déplacements professionnels des agents est d'encourager l’utilisation du train, un mode de transport largement moins polluant que la voiture ou l'avion. Face à ce défi écologique, une question se pose : l'employeur public peut-il attribuer des congés supplémentaires pour inciter ses agents à prendre le train plutôt que d'autres moyens de transport ? Bien que cette pratique soit déjà expérimentée dans certains secteurs privés, elle pourrait-elle s'appliquer dans la fonction publique territoriale ? Cet article explore les enjeux, les obstacles et les alternatives possibles pour mettre en place une telle mesure.
1. La fonction publique territoriale face aux enjeux écologiques
La transition énergétique est au cœur des priorités des pouvoirs publics. Dans ce cadre, la fonction publique territoriale, en tant qu’employeur responsable, joue un rôle clé dans la réduction de l'empreinte carbone des territoires. Les déplacements professionnels des agents publics représentent une part importante des émissions de CO2 des collectivités locales. Ces trajets, souvent effectués en voiture individuelle, sont responsables d'une pollution significative, d'autant plus qu'ils concernent principalement des déplacements longue distance.
L’introduction de mesures concrètes pour inciter les agents à adopter des modes de transport plus respectueux de l’environnement, comme le train, s'inscrit dans une démarche cohérente avec les engagements environnementaux de la France, qui prévoit une réduction des émissions de gaz à effet de serre de 40 % d'ici 2030. Encourager l’usage du train permet ainsi à la fonction publique territoriale de participer activement à la réduction de l'empreinte écologique tout en garantissant l’efficacité des services publics.
2. Le train : un choix écologique et économique
Le train est l'un des modes de transport les plus écologiques, émettant jusqu’à 5 fois moins de CO2 par passager que la voiture individuelle et jusqu’à 10 fois moins que l’avion pour des trajets similaires. En France, la SNCF a d'ailleurs mis en place des initiatives pour réduire encore l'empreinte carbone de ses trains, notamment avec la mise en circulation de trains électriques, qui représentent une alternative particulièrement intéressante pour les déplacements professionnels.
Au-delà des considérations environnementales, le train présente également des avantages économiques pour les employeurs publics, en raison de son coût souvent compétitif par rapport à d’autres moyens de transport pour les trajets interrégionaux. Dans cette optique, les employeurs publics peuvent chercher à encourager l’utilisation du train pour les déplacements professionnels en prenant en charge les frais ou en introduisant des politiques favorisant son usage.
3. L’attribution de congés supplémentaires : un levier incitatif ?
L’idée d’attribuer des congés supplémentaires aux agents publics choisissant le train, afin de récompenser un comportement éco-responsable, est séduisante. Elle présente un double intérêt : réduire les émissions de CO2 et renforcer l'engagement des agents publics dans une démarche écologique. Toutefois, cette proposition soulève plusieurs questions, notamment juridiques, pratiques et organisationnelles.
Aspects juridiques et statutaires
Les congés dans la fonction publique territoriale sont soumis à des règles statutaires strictes. Ils sont attribués pour des motifs précis, tels que le congé annuel, les congés maladie, les congés familiaux, etc. Ainsi, la création de congés supplémentaires en lien avec l’adoption de comportements écologiques ne fait pas partie des pratiques statutaires existantes.
Cependant, rien n'interdit de mettre en place des dispositifs incitatifs via des accords collectifs ou des primes, sous réserve d’une négociation avec les partenaires sociaux. Ces initiatives, à condition d’être bien cadrées, pourraient constituer un moyen efficace d’encourager les agents à adopter une mobilité plus durable. L’attribution de congés supplémentaires pourrait aussi être envisagée dans le cadre d’un programme de "bilan carbone" annuel, où les agents s’engageraient dans des actions concrètes pour réduire leur empreinte environnementale.
Aspects pratiques et organisationnels
Sur le plan pratique, la mise en œuvre de congés supplémentaires pourrait rapidement se heurter à des difficultés organisationnelles. La gestion des absences est déjà complexe dans la fonction publique, et l’introduction de congés spécifiques pour récompenser une modalité de transport pourrait impacter la continuité du service public. De plus, un suivi administratif rigoureux serait nécessaire pour certifier l’utilisation effective du train, ce qui risquerait d’entraîner une charge supplémentaire pour les services RH.
4. Des alternatives à l'attribution de congés supplémentaires
Si l'attribution de congés supplémentaires est une option théorique intéressante, d’autres solutions plus pragmatiques pourraient être explorées pour inciter les agents à privilégier le train.
- La prime de mobilité durable : de nombreuses collectivités ont déjà mis en place une prime de mobilité durable, qui récompense les agents pour l’utilisation de modes de transport écologiques. Cette prime peut être un levier efficace pour encourager les agents à adopter des comportements plus responsables, sans entrer dans des questions de congés ou d'absences.
- La prise en charge des frais de transport : une prise en charge complète ou partielle des frais de transport en train constitue une solution plus simple et plus directement applicable. Elle permet de rendre le train plus attractif par rapport à la voiture, tout en évitant les complications administratives liées à l’attribution de congés.
- Des actions de sensibilisation et de formation : la fonction publique territoriale peut également engager ses agents dans une démarche plus écoresponsable à travers des actions de sensibilisation et des formations sur les enjeux de la transition écologique et de la mobilité durable. Ces actions peuvent compléter les incitations financières et aider à ancrer durablement des comportements responsables au sein des équipes.
Si l’attribution de congés supplémentaires pour inciter les agents publics à utiliser le train est une idée originale, elle se heurte à des obstacles juridiques et organisationnels importants. Toutefois, des solutions alternatives telles que les primes de mobilité durable, la prise en charge des frais de transport et des actions de sensibilisation peuvent offrir des leviers efficaces pour encourager les comportements responsables sans perturber le cadre statutaire.
En fin de compte, la fonction publique territoriale dispose de nombreux outils pour participer activement à la transition énergétique. L’enjeu réside dans la capacité à conjuguer efficacité des services publics et réduction de l'empreinte carbone, tout en veillant à la satisfaction des agents et à la gestion optimale des ressources publiques.
Avis www.naudrh.com : nous trouvons que l’idée d’attribuer des congés supplémentaires est séduisante, mais elle nécessiterait une réflexion approfondie pour être mise en place sans perturber le fonctionnement des collectivités locales. Les alternatives comme la prime de mobilité durable nous semblent des solutions plus facilement applicables et tout aussi efficaces pour encourager la mobilité durable tout en respectant les contraintes statutaires.
Par Pascal NAUD
Président www.naudrh.com
Contact naudrhexpertise@gmail.com