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Dans la fonction publique, le recrutement constitue un enjeu stratégique majeur. Pourtant, les concours comme les recrutements par voie directe sont parfois la cible de critiques récurrentes de la part des observateurs, des agents eux-mêmes ou des élus. Deux reproches reviennent souvent : un certain laxisme dans les attendus et une opacité des processus. Ces critiques, si elles ne doivent pas être généralisées, méritent une analyse lucide et des réponses concrètes.
La diversité des pratiques de recrutement dans les trois versants de la fonction publique (État, hospitalière, territoriale) rend l'analyse complexe. Toutefois, des tendances préoccupantes peuvent être identifiées:
-Des exigences perçues comme trop faibles : certains concours internes, ou même des recrutements externes, donnent parfois lieu à des sélections jugées indulgentes, notamment dans des secteurs en tension (petites communes, métiers en pénurie). À titre d’exemple, certains concours affichent des taux de réussite supérieurs à 80 %, ce qui interroge sur leur pouvoir sélectif.
-Des recrutements directs peu lisibles : le recours croissant aux contractuels suscite parfois des interrogations sur les critères de sélection, la transparence des jurys, voire des soupçons de cooptation ou de proximité politique.
Les critiques s'appuient sur des réalités qu'il convient d'examiner sans complaisance :
-Un contexte de raréfaction des candidats : face aux difficultés à attirer des profils qualifiés, certaines collectivités abaissent leurs exigences pour pourvoir les postes vacants.
-Une perte de sens du concours : la généralisation des concours sur titre, la place prépondérante de l’entretien oral, et l’érosion de la culture administrative affaiblissent la portée méritocratique du dispositif.
-Des jurys inégalement préparés : la formation hétérogène des membres des jurys, notamment lorsqu’ils incluent des élus, contribue à des décisions perçues comme incohérentes ou biaisées.
Pour les professionnels RH, restaurer la crédibilité des processus de sélection passe par des actions concrètes :
-Professionnaliser les jurys : prévoir des formations systématiques à destination des membres des jurys, incluant les principes statutaires, la lutte contre les discriminations et l’analyse rigoureuse des compétences.
-Renforcer la traçabilité et la justification des décisions : systématiser les grilles d’évaluation, les comptes rendus de jury et les avis motivés permet de garantir l’équité et de pouvoir répondre aux éventuelles contestations.
-Adopter des méthodes d’évaluation rigoureuses et objectivables : recourir à des cas pratiques, des mises en situation ou des tests techniques, y compris lors d'entretiens, renforce l’impartialité et la pertinence de la sélection.
-Rééquilibrer les épreuves : redonner toute leur place aux épreuves écrites, à la rédaction et aux savoirs fondamentaux (logique, expression, droit public) pour valoriser les capacités réelles plutôt que l’aisance orale seule. Les disparités actuelles entre concours, dont certains ne comportent plus aucune épreuve écrite, illustrent la nécessité de ce rééquilibrage.
-Assumer une culture de l’exigence : dans les messages transmis aux élus, aux directions comme aux candidats, affirmer que la fonction publique ne peut faire l’économie d’un haut niveau d’exigence, même en contexte de pénurie.
Excellence et transparence comme socles de la confiance
Dans un contexte de transformation rapide de l'action publique, la qualité des recrutements devient un levier stratégique. Les critiques de laxisme ou d’opacité doivent être prises au sérieux comme des signaux d’alerte pour refonder la confiance. Il appartient aux DRH et aux professionnels du recrutement, en lien étroit avec les élus, d’ancrer les processus dans une logique d’exigence, de transparence et de justice. C’est à ce prix que la fonction publique pourra continuer à incarner un modèle d’administration au service de l’intérêt général.
Avis www.naudrh.com : les concours et recrutements directs sont encore trop souvent vécus comme des formalités ou des compromis, alors qu’ils devraient être des actes fondateurs de la qualité du service public. L’excellence n’est pas un luxe mais une nécessité, surtout dans un contexte où la légitimité de l’action publique est scrutée et questionnée en permanence.
Par Pascal NAUD
Président www.naudrh.com
Contact naudrhexpertise@gmail.com